JUSTICE. On ne crie pas impunément à Marseille. Même dans une gare, même à l'heure de pointe, même si on fait rire les voyageurs. Un enseignant de 47 ans un peu anti-sarkozyste sur les bords risque bien d'en faire les frais, mardi prochain, devant le tribunal de police de Marseille. Motif de la comparution: «tapage injurieux diurne troublant la tranquillité d’autrui».
L'affaire remonte à plus d'un an. Le 27 février 2008, il est presque 18 heures gare Saint-Charles quand deux policiers font un contrôle d'identité tendu. Notre enseignant, qui passait par là, s'en émeut et, pointant les policiers du doigt, lance haut et fort «Sarkozy, je te vois!». Deux fois. Les passagers sont hilares, les policiers nettement moins, qui embarquent illico l'impertinent au commissariat.
Les policiers, «sans doute un peu vexés», glisse Me Philippe Vouland, l'avocat de l'enseignant, lui reprochent alors, non pas l'injure ou l'outrage, mais d'avoir fait du bruit de nature à troubler la santé d'autrui, sur la base de l'article R1337 du code de la santé publique.
Les jours passent, l'incident semble clos, quand un an plus tard le Marseillais est convoqué au commissariat puis cité à comparaître. Le motif des poursuites a entre temps changé, relève l'avocat: en plus d'être bruyant le tapageur a été «injurieux».
Ce qui, en vertu de l'article R632-2 du code pénal, expose le contrevenant à 450 euros d'amende.
«Du tapage diurne à l'heure de pointe en pleine gare Saint-Charles, dans une ville bruyante comme Marseille, faut quand même faut pas pousser», s'offusque pince-sans-rire Me Vouland, qui compte plaider «l'ambiguité de la situation». Et au besoin procéder à une petite démonstration par l'absurde en réclamant une reconstitution des faits, expert et neurologue à l'appui, pour mesurer, un mardi à 17h50, la différence de décibels qu’aurait pu provoquer l’exclamation de son client et les effets sur la santé d'autrui.